ALLENDE-SANTACRUZ LUCAS
Chemin de la Résistance et des Maquis
Mis en ligne sur le site le 17 avril 2020 / mise à jour 8 juillet 2024
Source des documents suivants : Dossier FTPF 1946 carton 12
(numérisation Pôle Jean Moulin LG)
Source : https://www.letelegramme.fr/cotes-darmor/lannion/lucas-fernando-allende-une-vie-de-resistance-18-08-2014-10302112.php
Lucas Fernando Allende. Une vie de résistance
Combattant, résistant, déporté, ébéniste. En Espagne puis en France. Lucas Fernando Allende Santa Cruz a lutté contre le régime de Franco. Dénoncé, il a été déporté à Dachau en 1944. Sa fille, Claudine, et ses frères, habitants de Vieux-Marché, ont retracé son parcours dont il parlait peu. L'histoire d'une vie de résistance.
Qui est Lucas Fernando Allende Santa Cruz ?
C'est notre père. Il est né le 18 octobre 1914 à Maliaño de Camargo, province de Santander. En France, sa date de naissance a été modifiée, certainement pour ne pas être reconnu après la guerre d'Espagne. Il a donc rajeuni de cinq ans, né le 19 octobre 1919.
Dans quel contexte son histoire s'est-elle écrite ?
Le 17 et 18 juillet 1936, la guerre a éclaté en Espagne. Alors que la république était établie depuis quelques mois, les généraux factieux se sont soulevés contre le gouvernement légal. Ce putsch a été appuyé par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste, qui ont apporté leur soutien en hommes et en matériel aux insurgés. Pour lutter contre le général Franco, 40.000 volontaires des Brigades internationales de 53 pays différents, dont 600 Bretons, ont été envoyés, afin de secourir la République.
Quel rôle a joué votre père ?
Dans ce contexte de guerre, Lucas s'est engagé comme garde d'assaut au « Cuerpo de Asalto y Seguridad », où il a obtenu le grade de sergent. D'abord Santander puis Gijòn en Asturies, les deux batailles auxquelles il a participé ont été perdues, prises par les insurgés. Tout le nord cantabrique est alors aux mains des rebelles. Lucas prend la direction du port de La Rochelle pour regagner le nord-est de l'Espagne, encore libre. Mais le 26 janvier 1939, Barcelone tombe aux mains des Franquistes. Date à laquelle débute « la Retirada » : l'exil des réfugiés civils puis des combattants de la république espagnole.
Quelle fut alors sa vie en France ?
Il a fait partie de tous ces réfugiés qui ont été parqués dans les camps de « concentration ». C'est le terme officiel de l'époque. D'abord celui d'Argelès-sur-Mer, celui de Gurs, de Septfonds, puis celui d'Albi avant de revenir à nouveau sur Argelès jusqu'au 13 juin 1941. Le lendemain, Lucas, comme beaucoup d'autres combattants républicains espagnols, a été livré aux Allemands par le gouvernement de Pétain. C'est comme ça qu'il s'est retrouvé à travailler à la construction de la base des sous-marins de Brest.
A-t-il poursuivi son action de résistance ?
Oui, il appartenait au groupe de résistance « Los Deportistas ». Son rôle était de distribuer des tracts et des journaux. Mais aussi de récolter de l'argent pour les réfugiés se trouvant dans la clandestinité. Malheureusement, le 28 mars 1944, le groupe tombe suite à une dénonciation. Onze Espagnols sont alors arrêtés. Le responsable, Antonio Garcìa Martìn, fut fusillé et Lucas, comme les autres Espagnols, est transféré à la prison Jacques Cartier à Rennes, puis au camp de Compiègne. Le 18 juin 1944, il intègre un convoi de wagons à bestiaux, qui prend la direction du camp de concentration nazi de Dachau. On lui donne le matricule 74.133.
Une épreuve dont il s'est relevé ?
Je n'ai pas d'information sur les conditions de son enfermement... Le camp de Dachau a été libéré le 29 avril 1945 par l'armée américaine. Lucas ne reviendra en Côtes-du-Nord que vers la fin de l'année 1946. Il sera alors employé aux ateliers de meubles Le Goff à Plouaret, comme ébéniste. Ensuite, il a rencontré ma mère, Suzanne Pastol, puis ils se sont installés à Vieux-Marché. Nous sommes leurs trois enfants, Jean-Louis, Claudine et Bruno, à perpétuer sa mémoire.
Comment en êtes-vous venue à effectuer toutes ces recherches ?
Je me consacre depuis 2009 au parcours de notre père. J'avais envie de voir par où il était passé. Comme il nous a raconté si peu de chose... Ça a été difficile, mais je ne peux pas aller plus loin que je ne suis allée aujourd'hui. Il voulait que nous soyons des enfants comme les autres et surtout, je dis bien surtout, essayer d'oublier ou d'atténuer toutes ses souffrances.
Lucas Fernando Allende. Une vie de résistance
Combattant, résistant, déporté, ébéniste. En Espagne puis en France. Lucas Fernando Allende Santa Cruz a lutté contre le régime de Franco. Dénoncé, il a été déporté à Dachau en 1944. Sa fille, Claudine, et ses frères, habitants de Vieux-Marché, ont retracé son parcours dont il parlait peu. L'histoire d'une vie de résistance.
Qui est Lucas Fernando Allende Santa Cruz ?
C'est notre père. Il est né le 18 octobre 1914 à Maliaño de Camargo, province de Santander. En France, sa date de naissance a été modifiée, certainement pour ne pas être reconnu après la guerre d'Espagne. Il a donc rajeuni de cinq ans, né le 19 octobre 1919.
Dans quel contexte son histoire s'est-elle écrite ?
Le 17 et 18 juillet 1936, la guerre a éclaté en Espagne. Alors que la république était établie depuis quelques mois, les généraux factieux se sont soulevés contre le gouvernement légal. Ce putsch a été appuyé par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste, qui ont apporté leur soutien en hommes et en matériel aux insurgés. Pour lutter contre le général Franco, 40.000 volontaires des Brigades internationales de 53 pays différents, dont 600 Bretons, ont été envoyés, afin de secourir la République.
Quel rôle a joué votre père ?
Dans ce contexte de guerre, Lucas s'est engagé comme garde d'assaut au « Cuerpo de Asalto y Seguridad », où il a obtenu le grade de sergent. D'abord Santander puis Gijòn en Asturies, les deux batailles auxquelles il a participé ont été perdues, prises par les insurgés. Tout le nord cantabrique est alors aux mains des rebelles. Lucas prend la direction du port de La Rochelle pour regagner le nord-est de l'Espagne, encore libre. Mais le 26 janvier 1939, Barcelone tombe aux mains des Franquistes. Date à laquelle débute « la Retirada » : l'exil des réfugiés civils puis des combattants de la république espagnole.
Quelle fut alors sa vie en France ?
Il a fait partie de tous ces réfugiés qui ont été parqués dans les camps de « concentration ». C'est le terme officiel de l'époque. D'abord celui d'Argelès-sur-Mer, celui de Gurs, de Septfonds, puis celui d'Albi avant de revenir à nouveau sur Argelès jusqu'au 13 juin 1941. Le lendemain, Lucas, comme beaucoup d'autres combattants républicains espagnols, a été livré aux Allemands par le gouvernement de Pétain. C'est comme ça qu'il s'est retrouvé à travailler à la construction de la base des sous-marins de Brest.
A-t-il poursuivi son action de résistance ?
Oui, il appartenait au groupe de résistance « Los Deportistas ». Son rôle était de distribuer des tracts et des journaux. Mais aussi de récolter de l'argent pour les réfugiés se trouvant dans la clandestinité. Malheureusement, le 28 mars 1944, le groupe tombe suite à une dénonciation. Onze Espagnols sont alors arrêtés. Le responsable, Antonio Garcìa Martìn, fut fusillé et Lucas, comme les autres Espagnols, est transféré à la prison Jacques Cartier à Rennes, puis au camp de Compiègne. Le 18 juin 1944, il intègre un convoi de wagons à bestiaux, qui prend la direction du camp de concentration nazi de Dachau. On lui donne le matricule 74.133.
Une épreuve dont il s'est relevé ?
Je n'ai pas d'information sur les conditions de son enfermement... Le camp de Dachau a été libéré le 29 avril 1945 par l'armée américaine. Lucas ne reviendra en Côtes-du-Nord que vers la fin de l'année 1946. Il sera alors employé aux ateliers de meubles Le Goff à Plouaret, comme ébéniste. Ensuite, il a rencontré ma mère, Suzanne Pastol, puis ils se sont installés à Vieux-Marché. Nous sommes leurs trois enfants, Jean-Louis, Claudine et Bruno, à perpétuer sa mémoire.
Comment en êtes-vous venue à effectuer toutes ces recherches ?
Je me consacre depuis 2009 au parcours de notre père. J'avais envie de voir par où il était passé. Comme il nous a raconté si peu de chose... Ça a été difficile, mais je ne peux pas aller plus loin que je ne suis allée aujourd'hui. Il voulait que nous soyons des enfants comme les autres et surtout, je dis bien surtout, essayer d'oublier ou d'atténuer toutes ses souffrances.
Lucas Allende Santa-Cruz est né en 1914 en Espagne. Après avoir combattu puis fuit les armées de Franco, c'est comme résistant au sein d'un groupe F.T.P.F. MOI qu'il est arrêté puis déporté au camp nazi de Dachau duquel il survivra pour revenir en Bretagne. Il se mariera et vivra au Vieux-Marché jusqu'en 1995. Depuis 2009, sa fille Claudine a cherché dans les archives son histoire qu'il ne lui avait pas transmise.
Une vie marquée par les camps de concentration
Lucas, le père de Claudine Allende Santa-Cruz, est revenu du camp de concentration de Dachau. Comme beaucoup dans son cas, il n'en a pas parlé. Ni des camps des républicains espagnols en France.
Témoignage
Beaucoup de déportés ayant survécu aux camps d'extermination et de concentration n'ont jamais voulu ou pu parler. Lucas Allende Santa-Cruz est revenu de Dachau et, lui non plus, n'en a pas parlé chez lui, au Vieux-Marché.
Le camp de concentration nazi de Dachau, au sud de l'Allemagne, a été libéré par les Américains le 29 avril 1945, mais ce n'est que le 30 mai que Lucas a pu partir. « On ne les a pas laissés sortir, il y avait une épidémie de typhus dans le camp », explique Claudine, sa fille.
Lucas Allende Santa-Cruz avait été amené dans ce camp par l'avant-dernier train parti de Compiègne, le 18 juin 1944, douze jours après le Débarquement de Normandie. « Les Allemands se dépêchaient de les faire partir », dit sa fille. Il avait été dénoncé, comme dix autres Espagnols travaillant à Brest, à la base sous-marine allemande. Tous étaient d'anciens Républicains ayant combattu Franco de 1936 à 1939.
La guerre d'Espagne et les camps français
« Il a d'abord combattu contre l'armée franquiste à Santander, puis à Gijón dans les Asturies. Après ces deux défaites, il a pris la mer pour arriver à La Rochelle », note sa fille. Puis, il est reparti combattre dans le nord-est de l'Espagne. Mais, le 26 janvier 1939, Barcelone est tombé.
Commence alors « la retirada » (« retraite » en espagnol) qui voit plus 450 000 combattants et civils républicains espagnols passer les Pyrénées.
La France rassemble ces Espagnols dans des « camps de concentration ». « C'est l'appellation de l'époque. Il s'agit de réunir les gens. À Argelès-sur-Mer, il n'y a pas de baraques », note sa fille. Lucas va passer par les camps de Septfonds, Gurs, d'Albi et à nouveau Argelès-sur-Mer. Il est aussi envoyé dans une aciérie du Tarn.
Finalement, le 14 juin 1941, il est livré aux Allemands pour travailler à la base des sous-marins de Brest. Le 28 mars 1944, il est dénoncé comme résistant, il distribuait des tracts, des journaux, et récoltait de l'argent pour aider des réfugiés dans la clandestinité.
De retour en Bretagne
Après une convalescence en Suisse, Lucas Allende Santa-Cruz revient à Brest en 1946. Il trouve un travail de menuisier-ébéniste aux ateliers Le Goff, à Plouaret. Il rencontre sa femme, Suzanne Pastol.
Le frère de Suzanne, Louis Pastol, a été arrêté en mars 1943, pour avoir manifesté à Plouaret contre les Allemands et le STO (service de travail obligatoire). Il a été déporté vers les camps de Sachsenhausen, Flossenbürg et dans des Kommandos annexes. Il n'est jamais revenu.
Claudine Allende Santa-Cruz n'a jamais entendu son père parler de cette vie dans les camps qui lui avait donné une santé fragile. Comme si cela n'avait jamais existé ? Pas tout à fait, elle se souvient que son père ne manquait jamais une cérémonie du souvenir. Il avait reçu de nombreuses décorations françaises. Il y avait aussi les visites aux amis espagnols de Brest.
En 1975, son père est même retourné à Dachau. Quelques années auparavant, en 1968, alors naturalisé français, il avait aussi fait le voyage jusqu'en Espagne et revu sa mère près de Santander. Il est décédé en 1995.
C'est seulement en 2009, une fois à la retraite, que Claudine s'est mise à rechercher son histoire dans les archives. Elle connaît par coeur les grandes lignes du parcours de son père, pas les détails. « On ne peut plus dire que ce n'est pas vrai », dit-elle. Elle transmet maintenant cette histoire en cours d'espagnol, dans des établissements scolaires.