NAKACHE Alfred
Chemin de la Résistance et des Maquis
Mis en ligne sur le site le 17 avril 2020 / mise à jour 8 juillet 2024
Source : https://www.yadvashem.org/yv/fr/expositions/a-travers-lhistoire/nakache.asp
A travers le prisme de l'histoire
Mini exposition des collections de Yad Vashem
Alfred Nakache :
Nageur olympique français et rescapé de la Shoah
Alfred Nakache naît à Constantine (Algérie française) en 1915. Il grandit au sein d’une famille juive traditionnelle de dix enfants. En 1931, il est déjà champion de natation d’Afrique du Nord et l’un des pionniers de la nage papillon. Nakache continue à exceller et participe dans les années 30 aux championnats de France de natation à Paris.
Lors des Jeux olympiques de Berlin en 1936, il fait partie de l’équipe de France de natation et se classe 4ème avec l'équipe du relais 4x200 m nage libre. A partir de 1936, Nakache remporte à six reprises le titre de champion de France 100 m nage libre, et à quatre reprises celui du 200 m nage libre et celui du 200 m brasse. Il accumule les titres français en natation et bat plusieurs records nationaux.
Lorsque les Allemands envahissent la France, Alfred et son épouse Paule s'enfuient à Toulouse, dans la zone contrôlée par Vichy et y ouvrent un gymnase. En 1941, Nakache bat le record du monde du 200 m brasse (2:36.8) mais à partir de 1943, il est exclu des compétitions en raison de sa judéité. Alfred Nakache et sa famille tentent avec d’autres Juifs de rallier l'Espagne à partir de Toulouse en passant par les Pyrénées, mais craignant que les pleurs de leur petite fille ne mettent en péril la vie des autres membres du groupe, la famille rebrousse chemin vers Toulouse.
En novembre 1943, Alfred Nakache et sa famille sont arrêtés à Toulouse suite à une dénonciation puis incarcérés à la prison Saint Michel. Le 26 décembre 1943, les Nakache sont transférés à Drancy où ils vont passer leur dernier mois ensemble. En janvier 1944, ils sont déportés par le convoi n°66 de Drancy à Auschwitz. Sur les 1153 déportés présents à bord de ce convoi, 291 sont sélectionnés pour les travaux forcés.
Les autres sont gazés dès leur arrivée. Parmi eux, la femme et la fille d’Alfred. Ignorant ce qu'il est advenu de celles-ci, Alfred est affecté au camp de travail d’Auschwitz III-Monowitz et survit.
Durant l'hiver très rude de l’année 1945, Alfred Nakache est contraint d’évacuer Auschwitz dans le cadre d'une marche de la mort et sera finalement libéré à Buchenwald. Après la guerre, il retourne à Toulouse où il apprend que sa femme Paule et sa fille Annie ont été assassinées à Auschwitz. Des Feuilles de témoignage en leur mémoire ont été remplies à Yad Vashem par Lorne Gilbert, la sœur de Paule.
Après la fin de la guerre, Alfred Nakache se rétablit et reprend la natation. Il bat le record du monde du relais 3 x 100 m en 1946, moins d’un an après sa libération de Buchenwald. En 1948, il participe aux premiers Jeux olympiques d’été d’après-guerre à Londres. En 1983, il succombe à une crise cardiaque au cours d’une séance d’entraînement.
A travers le prisme de l'histoire
Mini exposition des collections de Yad Vashem
Alfred Nakache :
Nageur olympique français et rescapé de la Shoah
Alfred Nakache naît à Constantine (Algérie française) en 1915. Il grandit au sein d’une famille juive traditionnelle de dix enfants. En 1931, il est déjà champion de natation d’Afrique du Nord et l’un des pionniers de la nage papillon. Nakache continue à exceller et participe dans les années 30 aux championnats de France de natation à Paris.
Lors des Jeux olympiques de Berlin en 1936, il fait partie de l’équipe de France de natation et se classe 4ème avec l'équipe du relais 4x200 m nage libre. A partir de 1936, Nakache remporte à six reprises le titre de champion de France 100 m nage libre, et à quatre reprises celui du 200 m nage libre et celui du 200 m brasse. Il accumule les titres français en natation et bat plusieurs records nationaux.
Lorsque les Allemands envahissent la France, Alfred et son épouse Paule s'enfuient à Toulouse, dans la zone contrôlée par Vichy et y ouvrent un gymnase. En 1941, Nakache bat le record du monde du 200 m brasse (2:36.8) mais à partir de 1943, il est exclu des compétitions en raison de sa judéité. Alfred Nakache et sa famille tentent avec d’autres Juifs de rallier l'Espagne à partir de Toulouse en passant par les Pyrénées, mais craignant que les pleurs de leur petite fille ne mettent en péril la vie des autres membres du groupe, la famille rebrousse chemin vers Toulouse.
En novembre 1943, Alfred Nakache et sa famille sont arrêtés à Toulouse suite à une dénonciation puis incarcérés à la prison Saint Michel. Le 26 décembre 1943, les Nakache sont transférés à Drancy où ils vont passer leur dernier mois ensemble. En janvier 1944, ils sont déportés par le convoi n°66 de Drancy à Auschwitz. Sur les 1153 déportés présents à bord de ce convoi, 291 sont sélectionnés pour les travaux forcés.
Les autres sont gazés dès leur arrivée. Parmi eux, la femme et la fille d’Alfred. Ignorant ce qu'il est advenu de celles-ci, Alfred est affecté au camp de travail d’Auschwitz III-Monowitz et survit.
Durant l'hiver très rude de l’année 1945, Alfred Nakache est contraint d’évacuer Auschwitz dans le cadre d'une marche de la mort et sera finalement libéré à Buchenwald. Après la guerre, il retourne à Toulouse où il apprend que sa femme Paule et sa fille Annie ont été assassinées à Auschwitz. Des Feuilles de témoignage en leur mémoire ont été remplies à Yad Vashem par Lorne Gilbert, la sœur de Paule.
Après la fin de la guerre, Alfred Nakache se rétablit et reprend la natation. Il bat le record du monde du relais 3 x 100 m en 1946, moins d’un an après sa libération de Buchenwald. En 1948, il participe aux premiers Jeux olympiques d’été d’après-guerre à Londres. En 1983, il succombe à une crise cardiaque au cours d’une séance d’entraînement.
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Nakache
Alfred Nakache
Alfred Nakache, né le 18 novembre 1915 à Constantine1,2 et mort le 4 août 1983 à Cerbère (Pyrénées-Orientales), est un nageur et joueur de water-polo français3. Surnommé « Artem » (le poisson), il est aussi connu sous le surnom de « nageur d'Auschwitz », où il a été déporté durant la Seconde Guerre mondiale.
Biographie
Un champion d'avant-guerre, de Constantine à Toulouse
(détail voir le lien = https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Nakache)
Le « nageur d'Auschwitz »
D'abord en vue pendant l'Occupation pour ses records où il devient rapidement l'un des nageurs les plus titrés du pays, il est progressivement dénoncé par la presse collaborationniste16 par antisémitisme. Il est finalement interdit de bassin lors des championnats de France de Toulouse en 1942, ce qui entraîne un boycott de ses camarades du TOEC.
Arrêté à la suite d'une dénonciation17par la Gestapo le 20 novembre 1943, il est retenu captif à la Prison Saint-Michel (Toulouse) puis au camp de Drancy, duquel il est déporté, avec sa femme Paule et leur fille de deux ans Annie, au camp d'extermination d'Auschwitz depuis la gare de Bobigny par le convoi n° 66 du 20 janvier 1944,10. Séparés physiquement dès leur arrivée le 23 janvier 1944, il ignore qu'elles sont assassinées et n'apprendra que plus tard la mort de sa fille dès son arrivée dans les camps tandis qu'il n'eut jamais d'information concernant son épouse, ce qui laisse émettre l'hypothèse qu'elle aurait été gazée avec leur bébé.
Un officier affecte Alfred Nakache à l'infirmerie, ce qui lui sauvera probablement la vie. Alfred détourne alors des aliments pour les malades. Il y rencontre Noah Klieger, qui rescapé lui aussi deviendra un célèbre journaliste sportif en Israël18. Aidé par une constitution physique exceptionnelle, il résiste aux mauvais traitements, y compris à l’humiliation imposée par les gardiens qui l’obligent à aller chercher avec les dents un poignard qu’ils ont jeté au fond de la piscine (en fait un bassin de rétention d’eau prévu pour les incendies).
Sa résistance consiste à défier ses bourreaux en improvisant à leur insu des séances de baignade dans la piscine en compagnie de quelques camarades. En janvier 1945, le camp est évacué dans le cadre des marches de la mort, sous la menace de l’avancée de l’Armée rouge. Alfred Nakache participe à l'une d'elles, au cours de laquelle les survivants des camps d’extermination sont menés dans des camps d’internement. Il se retrouve ainsi à Buchenwald, que l'armée américaine libère en avril 1945.
Le retour du champion rescapé
À son retour de déportation, il témoigne : « Je sors de la tombe. il faut avoir vécu la vie de ces camps pour s'imaginer ce que c'était. Quand on fera le compte des rescapés et des manquants, on aura du mal à en croire les chiffres. De 85 kilos, je suis tombé à 61, et je ne dois la vie qu'à ma volonté d'en sortir, de ne pas manger d'immondices ou de cadavres malgré la faim. Je pèse actuellement 70 kilos » et conserve le maigre espoir de revoir sa femme et sa fille : « Aucune nouvelle depuis que nous avons été séparés sur le quai de la gare.
Je conserve un faible espoir, un espoir tout de même. Mais toutes les femmes, les enfants et tous les inaptes ont été passés au four crématoire21 ». Il retourne à Toulouse, avec sa seconde épouse, et devient professeur d’éducation physique à la Faculté de droit. Il reprend l'entraînement, et du poids, puisqu'à sa sortie d'Auschwitz, il ne pesait plus qu'une quarantaine de kilogrammes, et qu'avant Auschwitz il en pesait environ quatre-vingts4. Le croyant mort avant que la presse n'annonce son retour le 28 avril 1945, la ville avait donné son nom au bassin d'hiver de la piscine de l'île du Ramier.
Il retrouve le haut du classement (champion de France et prenant part au record du monde 3 × 100 m 3 nages, avec Georges Vallerey et Alex Jany, le 8 août 1946) et participe aux Jeux olympiques d'été de 1948 à Londres, devenant, en plus d'être nageur à l'épreuve de 200 m brasse papillon, également membre de l’équipe de France de water-polo. Il obtient là une nouvelle sélection douze ans après ses premiers Jeux olympiques.
En 1946, il apprend la confirmation de la mort de son épouse et de sa fille. En 1948, il s'unit à Marie, une jeune Sétoise. Il est alors très proche de la famille d'Alex Jany et il participe dans les années 1950 à l'entraînement de Jean Boiteux.
Après une fin de carrière à La Réunion, il meurt le 4 août 1983, à la suite d'un malaise alors qu’il nageait dans le port de Cerbère, effectuant son kilomètre quotidien de natation4. Il est inhumé au cimetière Le Py à Sète. Sur sa tombe apparaissent les noms de son épouse et de sa fille disparues.
(détail voir le lien = https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Nakache)
Alfred Nakache
Alfred Nakache, né le 18 novembre 1915 à Constantine1,2 et mort le 4 août 1983 à Cerbère (Pyrénées-Orientales), est un nageur et joueur de water-polo français3. Surnommé « Artem » (le poisson), il est aussi connu sous le surnom de « nageur d'Auschwitz », où il a été déporté durant la Seconde Guerre mondiale.
Biographie
Un champion d'avant-guerre, de Constantine à Toulouse
(détail voir le lien = https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Nakache)
Le « nageur d'Auschwitz »
D'abord en vue pendant l'Occupation pour ses records où il devient rapidement l'un des nageurs les plus titrés du pays, il est progressivement dénoncé par la presse collaborationniste16 par antisémitisme. Il est finalement interdit de bassin lors des championnats de France de Toulouse en 1942, ce qui entraîne un boycott de ses camarades du TOEC.
Arrêté à la suite d'une dénonciation17par la Gestapo le 20 novembre 1943, il est retenu captif à la Prison Saint-Michel (Toulouse) puis au camp de Drancy, duquel il est déporté, avec sa femme Paule et leur fille de deux ans Annie, au camp d'extermination d'Auschwitz depuis la gare de Bobigny par le convoi n° 66 du 20 janvier 1944,10. Séparés physiquement dès leur arrivée le 23 janvier 1944, il ignore qu'elles sont assassinées et n'apprendra que plus tard la mort de sa fille dès son arrivée dans les camps tandis qu'il n'eut jamais d'information concernant son épouse, ce qui laisse émettre l'hypothèse qu'elle aurait été gazée avec leur bébé.
Un officier affecte Alfred Nakache à l'infirmerie, ce qui lui sauvera probablement la vie. Alfred détourne alors des aliments pour les malades. Il y rencontre Noah Klieger, qui rescapé lui aussi deviendra un célèbre journaliste sportif en Israël18. Aidé par une constitution physique exceptionnelle, il résiste aux mauvais traitements, y compris à l’humiliation imposée par les gardiens qui l’obligent à aller chercher avec les dents un poignard qu’ils ont jeté au fond de la piscine (en fait un bassin de rétention d’eau prévu pour les incendies).
Sa résistance consiste à défier ses bourreaux en improvisant à leur insu des séances de baignade dans la piscine en compagnie de quelques camarades. En janvier 1945, le camp est évacué dans le cadre des marches de la mort, sous la menace de l’avancée de l’Armée rouge. Alfred Nakache participe à l'une d'elles, au cours de laquelle les survivants des camps d’extermination sont menés dans des camps d’internement. Il se retrouve ainsi à Buchenwald, que l'armée américaine libère en avril 1945.
Le retour du champion rescapé
À son retour de déportation, il témoigne : « Je sors de la tombe. il faut avoir vécu la vie de ces camps pour s'imaginer ce que c'était. Quand on fera le compte des rescapés et des manquants, on aura du mal à en croire les chiffres. De 85 kilos, je suis tombé à 61, et je ne dois la vie qu'à ma volonté d'en sortir, de ne pas manger d'immondices ou de cadavres malgré la faim. Je pèse actuellement 70 kilos » et conserve le maigre espoir de revoir sa femme et sa fille : « Aucune nouvelle depuis que nous avons été séparés sur le quai de la gare.
Je conserve un faible espoir, un espoir tout de même. Mais toutes les femmes, les enfants et tous les inaptes ont été passés au four crématoire21 ». Il retourne à Toulouse, avec sa seconde épouse, et devient professeur d’éducation physique à la Faculté de droit. Il reprend l'entraînement, et du poids, puisqu'à sa sortie d'Auschwitz, il ne pesait plus qu'une quarantaine de kilogrammes, et qu'avant Auschwitz il en pesait environ quatre-vingts4. Le croyant mort avant que la presse n'annonce son retour le 28 avril 1945, la ville avait donné son nom au bassin d'hiver de la piscine de l'île du Ramier.
Il retrouve le haut du classement (champion de France et prenant part au record du monde 3 × 100 m 3 nages, avec Georges Vallerey et Alex Jany, le 8 août 1946) et participe aux Jeux olympiques d'été de 1948 à Londres, devenant, en plus d'être nageur à l'épreuve de 200 m brasse papillon, également membre de l’équipe de France de water-polo. Il obtient là une nouvelle sélection douze ans après ses premiers Jeux olympiques.
En 1946, il apprend la confirmation de la mort de son épouse et de sa fille. En 1948, il s'unit à Marie, une jeune Sétoise. Il est alors très proche de la famille d'Alex Jany et il participe dans les années 1950 à l'entraînement de Jean Boiteux.
Après une fin de carrière à La Réunion, il meurt le 4 août 1983, à la suite d'un malaise alors qu’il nageait dans le port de Cerbère, effectuant son kilomètre quotidien de natation4. Il est inhumé au cimetière Le Py à Sète. Sur sa tombe apparaissent les noms de son épouse et de sa fille disparues.
(détail voir le lien = https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Nakache)
Ci dessus : Alfred Nakache, "le nageur d'Auschwitz"
Ci dessus : Natation : le nageur rescapé d'Auschwitz, Alfred Nakache, entre au panthéon de sa discipline
Source : https://www.la-croix.com/Sport/gloire-posthume-dAlfred-Nakache-nageur-deporte-Auschwitz-2019-05-19-1201022914
La gloire posthume d’Alfred Nakache, nageur déporté à Auschwitz
Portrait
Héros de la France de Vichy avant d’être déporté à Auschwitz, le nageur juif (1915-1983) a survécu à l’horreur des camps et a repris à son retour le cours de sa carrière.Tombé dans l’oubli durant des décennies, il fait son entrée ce week-end des 18 et 19 mai au Swimming Hall of Fame, prestigieux musée américain de la natation.
Jean-François Fournel, le 19/05/2019 à 14:41
Pour la plupart des Toulousains, Alfred Nakache évoque surtout le nom d’une piscine prestigieuse, construite dans le style art déco dans les années 1930. Un haut lieu de la vie sportive et un joli but de promenade sur une île de la Garonne, rien de plus. « Tout le monde connaît la piscine, mais rares sont les Toulousains qui seraient capables de dire qui est Alfred Nakache », souligne Michel Coloma, directeur des Dauphins, le grand club de natation hébergé sur place, qui a entrepris un travail de mémoire autour de ce nageur pas comme les autres.
Tous les ans, les enfants des écoles accueillis dans les lignes d’eau ont droit à une causerie sur le nageur. « C’est le moins qu’on puisse faire pour lui, poursuit Michel Coloma, et nous sommes immensément fiers qu’il soit reconnu par le plus grand musée de natation du monde. »
Le gamin né en Algérie à Constantine rejoint en effet le week-end des 18 et 19 mai cinq Français déjà honorés par le Swimming Hall of Fame, le prestigieux musée mondial de la natation, installé à Fort Lauderdale, en Floride. Ses prédécesseurs, Alex Jany, Christine Caron, Laure Manaudou, Alain Bernard et Camille Muffat ont été distingués pour leurs performances et leur statut de vedettes internationales. Pour Alfred Nakache, c’est une tout autre histoire qui justifie sa présence.
Il ne songe pas à se cacher
Elle commence au cours de l’hiver 1941-42. Le champion du monde du 100 m, un temps célébré par la France de Vichy comme modèle de la vie saine au grand air, est licencié de son poste de professeur de gymnastique à Paris, en raison de ses origines juives. « Cet aspect de sa culture lui était passé un peu au-dessus de la tête », raconte l’historien du sport, Patrick Clastres, qui a participé à l’élaboration de l’exposition sur les sportifs déportés organisée par le Mémorial de la Shoah, à Paris, en 2011. « Quand il a quitté Paris pour aller s’entraîner et enseigner à Toulouse, en zone libre, il se croyait à l’abri », poursuit l’historien.
Durant plusieurs mois, Alfred Nakache vaque à ses occupations et ne songe même pas à se cacher quand la totalité du territoire français tombe sous le joug de l’occupant, fin 1942. La suite est tragique : arrêté en décembre 1943, il est déporté avec sa femme et sa fille à Auschwitz, où il arrive fin janvier 1944. Lors du tri sur le quai d’arrivée, il est reconnu par un SS amateur de sport, qui lui indique le côté gauche, celui des hommes solides appelés à survivre. Sa femme et sa fille, elles, sont dirigées du côté droit, celui dont on ne
revient pas.
Sans doute aidé par des conditions physiques exceptionnelles, il résiste à la faim et aux mauvais traitements. Y compris à l’humiliation imposée par les gardiens l’obligeant à aller chercher avec les dents un poignard qu’ils ont jeté au fond de la tristement célèbre piscine du camp (en fait, un bassin de rétention d’eau prévu pour les incendies).
Tout le monde le croyait mort
En janvier 1945, le camp est évacué par les Nazis, sous la pression de l’avancée des troupes soviétiques. Alfred Nakache participe à la marche de la mort, au cours de laquelle les survivants d’extermination sont menés dans des camps d’internement. Il se retrouve à Buchenwald, d’où il est libéré en avril. Quelques jours après, il rentre à Toulouse et reprend l’entraînement dans une piscine, où une surprise l’attend. Dans une tentative hâtive de réparer l’irréparable, les autorités locales, qui le croyaient mort, avaient jugé utile de lui faire l’honneur posthume de donner son nom au site…
Le nageur retrouvera bientôt son titre de champion de France, battra un record du monde de relais et participera aux Jeux olympiques de Londres, en 1948. Nageant une nouvelle fois pour l’honneur de la France qui l’avait trahi. « Après tout ce qu’il avait subi, cela paraît incroyable, reconnaît l’historien Patrick Clastres. Mais il ne faut jamais lire le passé avec le regard d’aujourd’hui. Nakache était, comme la plupart de ses contemporains, un otage pris dans le nœud coulant de son époque. Sa vie, c’était de nager, alors il nage, quelles que soient les circonstances. »
La gloire posthume d’Alfred Nakache, nageur déporté à Auschwitz
Portrait
Héros de la France de Vichy avant d’être déporté à Auschwitz, le nageur juif (1915-1983) a survécu à l’horreur des camps et a repris à son retour le cours de sa carrière.Tombé dans l’oubli durant des décennies, il fait son entrée ce week-end des 18 et 19 mai au Swimming Hall of Fame, prestigieux musée américain de la natation.
Jean-François Fournel, le 19/05/2019 à 14:41
Pour la plupart des Toulousains, Alfred Nakache évoque surtout le nom d’une piscine prestigieuse, construite dans le style art déco dans les années 1930. Un haut lieu de la vie sportive et un joli but de promenade sur une île de la Garonne, rien de plus. « Tout le monde connaît la piscine, mais rares sont les Toulousains qui seraient capables de dire qui est Alfred Nakache », souligne Michel Coloma, directeur des Dauphins, le grand club de natation hébergé sur place, qui a entrepris un travail de mémoire autour de ce nageur pas comme les autres.
Tous les ans, les enfants des écoles accueillis dans les lignes d’eau ont droit à une causerie sur le nageur. « C’est le moins qu’on puisse faire pour lui, poursuit Michel Coloma, et nous sommes immensément fiers qu’il soit reconnu par le plus grand musée de natation du monde. »
Le gamin né en Algérie à Constantine rejoint en effet le week-end des 18 et 19 mai cinq Français déjà honorés par le Swimming Hall of Fame, le prestigieux musée mondial de la natation, installé à Fort Lauderdale, en Floride. Ses prédécesseurs, Alex Jany, Christine Caron, Laure Manaudou, Alain Bernard et Camille Muffat ont été distingués pour leurs performances et leur statut de vedettes internationales. Pour Alfred Nakache, c’est une tout autre histoire qui justifie sa présence.
Il ne songe pas à se cacher
Elle commence au cours de l’hiver 1941-42. Le champion du monde du 100 m, un temps célébré par la France de Vichy comme modèle de la vie saine au grand air, est licencié de son poste de professeur de gymnastique à Paris, en raison de ses origines juives. « Cet aspect de sa culture lui était passé un peu au-dessus de la tête », raconte l’historien du sport, Patrick Clastres, qui a participé à l’élaboration de l’exposition sur les sportifs déportés organisée par le Mémorial de la Shoah, à Paris, en 2011. « Quand il a quitté Paris pour aller s’entraîner et enseigner à Toulouse, en zone libre, il se croyait à l’abri », poursuit l’historien.
Durant plusieurs mois, Alfred Nakache vaque à ses occupations et ne songe même pas à se cacher quand la totalité du territoire français tombe sous le joug de l’occupant, fin 1942. La suite est tragique : arrêté en décembre 1943, il est déporté avec sa femme et sa fille à Auschwitz, où il arrive fin janvier 1944. Lors du tri sur le quai d’arrivée, il est reconnu par un SS amateur de sport, qui lui indique le côté gauche, celui des hommes solides appelés à survivre. Sa femme et sa fille, elles, sont dirigées du côté droit, celui dont on ne
revient pas.
Sans doute aidé par des conditions physiques exceptionnelles, il résiste à la faim et aux mauvais traitements. Y compris à l’humiliation imposée par les gardiens l’obligeant à aller chercher avec les dents un poignard qu’ils ont jeté au fond de la tristement célèbre piscine du camp (en fait, un bassin de rétention d’eau prévu pour les incendies).
Tout le monde le croyait mort
En janvier 1945, le camp est évacué par les Nazis, sous la pression de l’avancée des troupes soviétiques. Alfred Nakache participe à la marche de la mort, au cours de laquelle les survivants d’extermination sont menés dans des camps d’internement. Il se retrouve à Buchenwald, d’où il est libéré en avril. Quelques jours après, il rentre à Toulouse et reprend l’entraînement dans une piscine, où une surprise l’attend. Dans une tentative hâtive de réparer l’irréparable, les autorités locales, qui le croyaient mort, avaient jugé utile de lui faire l’honneur posthume de donner son nom au site…
Le nageur retrouvera bientôt son titre de champion de France, battra un record du monde de relais et participera aux Jeux olympiques de Londres, en 1948. Nageant une nouvelle fois pour l’honneur de la France qui l’avait trahi. « Après tout ce qu’il avait subi, cela paraît incroyable, reconnaît l’historien Patrick Clastres. Mais il ne faut jamais lire le passé avec le regard d’aujourd’hui. Nakache était, comme la plupart de ses contemporains, un otage pris dans le nœud coulant de son époque. Sa vie, c’était de nager, alors il nage, quelles que soient les circonstances. »