Joséphine Baker,
une femme libre aux mille visages
Chemin de la Résistance et des Maquis
Mis en ligne sur le site le 26 novembre 2021 / mise à jour le 30 novembre 2021
"C’est très pratique d’être Joséphine Baker"
Les informations collectées sont rédigées à l’encre sympathique, invisible sur ses partitions musicales. L’artiste transporte parfois elle-même ces notes compromettantes dans son soutien-gorge.
« C’est très pratique d’être Joséphine Baker. Dès que je suis annoncée dans une ville, les invitations pleuvent. À Séville, à Madrid, à Barcelone, le scénario est le même. J’affectionne les ambassades et les consulats qui fourmillent de gens intéressants. Je note soigneusement en rentrant (…). Mes passages de douane s’effectuent toujours dans la décontraction. Les douaniers me font de grands sourires et me réclament effectivement des papiers, mais ce sont des autographes ! », s’amusera plus tard la danseuse dans l’ouvrage autobiographique « Joséphine ».
Grave accident d’avion
Installée en Afrique du Nord à partir de 1941, la vedette, épuisée par cette double vie, tombe gravement malade. Mais, en 1943, elle reprend son activité artistique au service des troupes alliées, tout en récoltant du renseignement pour l’état-major du général de Gaulle. « Les Alliés ne disaient pas tout aux Forces françaises libres », relève l’historien.
En juin 1944, elle manque de mourir dans un accident d’avion au large de la Corse. « Les naufragés virent arriver à la nage un détachement de (tirailleurs) sénégalais », relate le journal de marche du groupe de liaison aérienne ministérielle, dessins colorés à l’appui, signé en 1946 de la main de l’artiste.
Engagée dans les forces féminines de l’armée de l’Air avec le grade de sous-lieutenant, elle débarque à Marseille en octobre 1944. La chanteuse donne des concerts près du front pour les soldats comme pour les civils. Après le 8 mai 1945, elle se produira en Allemagne devant des déportés libérés des camps.
"Ce statut de combattant est une quête existentielle pour elle"
Titulaire de la Légion d'honneur
En 1946, elle reçoit la médaille de la Résistance. Puis, on lui propose la Légion d'honneur à titre civil, mais elle la désire à titre militaire. Sa demande est appuyée par plusieurs personnalités de la France libre. « Française d’adoption, elle a donné un magnifique exemple à l’union française », écrira le général Martial Valin, compagnon de la Libération.
« Chez Joséphine Baker, il y avait une volonté très grande de ne pas être une chanteuse au service des armées, mais une combattante qui chante. Ce statut de combattant est une quête existentielle pour elle », souligne Géraud Létang.
Un compromis sera finalement trouvé : en 1961, l’artiste sera décorée de la Légion d'honneur à titre civil, mais aussi de la croix de guerre avec palmes.
« Notre mère a servi le pays, elle est un exemple des valeurs républicaines et humanistes », mais « elle a toujours dit : « Moi, je n’ai fait que ce qui était normal »», a raconté son fils aîné, Akio Bouillon.