AUTRET Yves
Capitaine PIERRE
Chemin de la Résistance et des Maquis
Mis en ligne sur le site le 11 janvier 2021
Aujourd'hui tes camarades et amis sont autour de toi, autour de ton épouse Marie-Thérèse et de toute ta famille pour te rendre un fraternel et respectueux hommage.
Capitaine Pierre, un jeune capitaine de 20 ans.
Longtemps avant de te rencontrer pour la 1ère fois, j'avais entendu parler de toi. Mon père, un de tes camarades de lutte, avait été frappé par ton extrême jeunesse et l'importance des responsabilités que tu assumais.
Il fallait faire face, vous aviez perdu tant des vôtres dans ce combat terrible, une élite, les meilleurs camarades disiez-vous.
Dès la guerre d'Espagne tu as fait ton choix.
Tu as 13-14 ans, et à l'image de Louis Berthelot que tu aimes et que tu respectes comme un père, tu es du côté de la République, du côté des opprimés, du côté de la justice sociale.
Que ce message universel porté par la révolution de 1789, Liberté, Egalité, Fraternité, aille vers plus de fraternité entre les travailleurs, entre les peuples en lutte pour leur liberté.
Du côté du partage, de la mise en commun, entre ceux qui ont tout et ceux qui n'ont rien. Rien d'autre que la force de leurs bras pour gagner leur pain.
Tu as choisi. Comme tes aînés-les affranchis comme tu les nommes- tu es aux côtes des communistes contre fascisme et nazisme, ces poisons violents qui vont déclencher la Seconde Guerre Mondiale, mettre l'Europe à feu et à sang, faire des millions de morts, détruire des pays entiers.
Pour l'Espagne, tu t'engages, jetant dans le drapeau rouge, jaune, violet tendu pour une quête de soutien, tout l'argent que tu avais sur toi.
Ce n'était sans doute pas beaucoup, mais c'était tout ce que tu avais.
La terrible défaite, l'occupation de notre pays, t'amène à t'engager plus encore, à prendre de grandes responsabilités.
Tu mets au service de ton pays toutes tes qualités d'intelligence, ta probité, ton courage, ton audace, mais aussi tu feras preuve de toute la prudence nécessaire pour protéger ceux que tu recrutes et organises.
Tu deviens à 18 ans le responsable départemental des jeunesses communistes clandestines, noyau de FTPF.
Tu sillonnes tout le Finistère pour mettre sur pied cette jeunesse engagée qui fournira en 44 les cadres des bataillons FTP-FFI qui libéreront notre département.
Tu étais fier d'eux, ceux de Brest, de Pont-de-buis, de Morlaix, de Quimperlé...Fier du courage de ces toutes jeunes filles agents de liaison, elles qui prenaient tant de risque. Fier de toute cette activité, sabotage, tracts, journaux clandestins...
L'audacieuse attaque de la prison Saint-Charles pour délivrer des camarades promis à la mort. ..
Les Ecoles Primaires Supérieures étaient cette pépinière. Ils ont tous fait nous disais-tu de valeureux combattants de 18-20 ans.
Les aînés n'étaient plus là.
La délation, l'acharnement de la police de Vichy avait fait des ravages terribles dans leurs rangs.
Les jeunes postiers de Quimper, Emile Le Page et Pierre Jolivet, les ouvriers brestois, Carlo Debortoli, Jules lesven, Pierre Corre, Albert Abalain et ses 18 camarades, tout le maquis de Penarpont...Tous fusillés. D'autres emprisonnés, abominablement torturés, déportés...
En décembre 43, mon père et toi vous échappez à la souricière tendue dans le petit appartement de mes parents, à Brest, par la sinistre gestapo de Bonne nouvelle. Une de tes planques ce soir là. Des scellés en interdiront désormais l'accès.
La mort t'attendait à chaque pas comme elle attendait tous ceux de l'Armée de l'Ombre.
Clandestin, une de tes bases est le maquis de l'Etoile rouge, à Plonévez-du-Faou.
Lors du débarquement tu fais partie de l'Etat-major FTP du département, sous les ordres de Daniel Trellu. Parmi tes camarades tu y retrouves mon père.
Tu es affecté au bataillon Normandie comme commissaire aux effectifs, auprès de la 1ère équipe jedburgh, Giles, parachutée pour encadrer les troupes et le combat.
Vous êtes félicités pour la qualité et l'ardeur des soldats sans uniforme
et devenez FTP-FFI.
Tu es chargé des parachutages et commence par repérer 12 terrains pour recevoir de Londres l'armement de ces bataillons en formation.
Ces armes tant attendues qui conduisent cette jeunesse aux côtés des armées alliés à la Libération du Finistère le 20 septembre 1944.
En 46 tu retournes à la vie civile.
Tu n'as pas un sou, tu as sacrifié tes études, mais tu as toute la vie devant toi.
Vivre debout. Tel était votre idéal à tous.
Vous étiez du côté de la vie, de l'espoir, mais il vous a bien fallu faire la guerre.
Qui l'aurait fait à votre place?
« Je suis fier d'avoir lutté pour l'indépendance de mon pays et pour sauver de l'esclavage le peuple de France » écrivait Albert Abalain.
Cette fierté est aussi la tienne.
Notre pays, notre République, a témoigné sa reconnaissance de tes services.
Tu as été élevé au grade de chevalier de la Légion d'Honneur, ton parrain était notre préfet.
Tes camarades, tes amis, nous tous ici, Yves, nous te disons Merci!
Repose en paix.
Tu rejoins fraternellement tes camarades de combat dans notre coeur et notre mémoire.
Hommage du bureau départemental de l'ANACR29 à leur Président d'Honneur Yves Autret,
Pour le bureau départemental,
Anne Friant-Mendrès
Ci dessus : Anne FRIANT lit le discours de l'ANACR du FINISTÈRE lors de l'enterrement de Yves AUTRET
Ci dessous : cliquez sur le dossier pour le télécharger.